Bokashi, un projet qui a la main verte !

Bokashi, un projet qui a la main verte !
  • Cambodge
  • Articles

Depuis plus de 15 ans, la promotion des techniques agroécologiques constitue le cœur de l’activité d’ADG au Cambodge. Cependant, cette transition se heurte à divers obstacles, comme celui de l’accès des agriculteur-trice-s à des engrais naturels de qualité.

Tout d’abord, parce que la fabrication individuelle de ce type d’engrais requiert des intrants naturels parfois difficilement accessible au sein même des fermes. Ensuite, parce que sa fabrication demande un temps et une énergie considérable pour tout fermier-e-s désireux de commercialiser ses produits à plus grande échelle. De plus, ces fertilisants « faits maisons » sont parfois de faible qualité. Enfin, parce que les fertilisants naturels disponibles sur le marché sont couteux et parfois eux aussi de qualité médiocre.

Ces difficultés ont pour résultat de freiner la transition agroécologique, pourtant essentielle à une gestion durable et respectueuse des sols.

Afin de pallier à ces problèmes, ADG, en partenariat avec la FAEC (Federation of Farmer Associations Promoting Family Agricultural Enterprise in Cambodia), a pour objectif d’assister les fermier-e-s de la coopérative d’Oudom Sorya dans la production d’un fertilisant naturel de haute qualité, le « Bokashi », et de l’aider à le commercialiser auprès d’autres producteurs et marchés locaux.

Le Bokashi est un mélange de matières organiques et de microorganismes essentiels au maintien et à l’amélioration de la structure du sol, de sa ventilation, de sa capacité de rétention en eau et de sa capacité d’absorption des éléments nutritifs. Les microorganismes utilisés améliorent également la résistance des sols face à diverses maladies et pathogènes.

Issue de la province de Takéo, Oudom Sorya est une coopérative agricole créée en 2013 par un groupe d’agriculteurs engagés collectivement autour d’activités commerciales telles que la production d’engrais et de riz. Elle rassemble aujourd’hui plus de 80 membres, dont 34 sont des femmes.

Pour ADG et la FAEC, l’objectif premier est d’améliorer la fertilité des sols en soutenant Oudom Sorya dans la production de cet engrais, à partir du partage d’intrants naturels présents dans plusieurs fermes de la coopérative.

Le but est d’obtenir un engrais qui soit d’une qualité suffisamment élevée pour permettre une augmentation de la production agricole des fermes et une augmentation du revenu des ménages. Évidemment, l’enjeu consiste aussi à créer un Bokashi dont le prix reste suffisamment accessible.

Pour mener à bien ce projet, ADG et la FAEC s’attèlent autour de trois axes principaux :

  • Développer une formule d’engrais naturel qui soit adaptée aux besoins des petits producteurs.
  • Soutenir Oudom Sorya dans la production de cet engrais.
  • Concevoir ensemble une stratégie de vente et de marketing.

Ces actions visent en premier lieu les membres de la coopérative. À termes cependant, il s’agira aussi d’attirer d’autres producteurs désireux d’utiliser des engrais naturels, mais qui n’ont ni le temps ni les intrants nécessaires pour les produire.

Enfin, sur le long terme, l’expérience avec Oudom Sorya servira de modèle pour d’autres coopératives agricoles et organisations paysannes du réseau

 


Le travail de Aude et Oudom, étudiant-e-s en agronomie, d’Eclosio et de la FAEC.



L’une est belge, l’autre cambodgien. Pour leur travail de fin d’études, ils ont décidé d’intégrer le projet du Bokashi. Pour eux, l’enjeu de trouver une alternative à l’utilisation des engrais chimiques fut une réelle source de motivation. D’après l’expérience conduite l’année dernière, le Bokashi produit par le programme possède déjà un taux d’efficacité trois fois supérieur aux fertilisants naturels produits par les agriculteurs, encourageant par là la poursuite de cette étude. Cette année, les recherches de Aude et Oudom auront pour but d’améliorer la qualité et l’efficacité du Bokashi précédent, tout en maintenant un prix abordable pour les producteurs locaux.

Comme le rappelle bien Aude, l’élaboration du Bokashi est loin d’être le résultat seul des recherches des étudiant-e-s. Il s’agit avant tout d’un travail d’équipe, dont les acteurs, ayant des compétences et approches différentes, enrichissent le projet.

En effet, le Bokashi est l’aboutissement d’un travail de 3 ans qui rassemble à la fois l’expérience de terrain des fermier-e-s de la coopérative, les connaissances des ingénieurs agronomes d’ADG, le soutien logistique et financier de la FAEC et d’ADG, l’échange de techniques avec d’autres organisations et les recherches estudiantines.

La première partie de leur travail consista à trouver, sur base du travail de l’étudiante précédente et d’autres études scientifiques, la méthodologie adéquate pour leurs recherches.

Une fois la méthodologie validée, le binôme s’est lancé au mois de mars dans la réalisation de trois types de microorganismes différents, dont l’analyse en laboratoire permit d’en révéler les plus efficaces. Arrivés à maturité, les microorganismes sélectionnés furent intégrés au Bokashi.

C’est donc le 5 et 6 avril, dans une ambiance à la fois sérieuse, mais décontractée, et sous un soleil de plomb, que les agriculteurs et les étudiant-e-s ont produit 1,8 tonne de Bokashi.

Le duo est actuellement en train de tester cette production.

Tandis qu’Oudom, de son côté, analyse l’azote, le phosphore, le potassium, la quantité de microorganismes présents et le taux d’humidité des échantillons en laboratoire.Avec l’aide des fermier-e-s, Aude s’attèle à préparer le terrain pour cette expérimentation : fabrication d’une nouvelle serre et réparation d’une ancienne, prise quotidiennes des mesures de PH et de la température du Bokashi et préparation des semis pour les salades et les brocolis chinois, les légumes cobayes de l’expérience.

Les semaines à venir auront pour but d’étudier le rendement du Bokashi. Tous les 4 jours, Aude mesure la taille des salades et des brocolis chinois. Le poids final de ces légumes permettra enfin de déterminer l’efficacité du nouveau Bokashi.

Pour le moment, ce qu’on peut déjà vous dire, c’est qu’ils poussent à vue d’œil et qu’ils sont bien verts ! Si les résultats sont réellement positifs, le Bokashi pourra être commercialisé.

C’est également sur ce pan que l’équipe d’ADG au Cambodge est en train de travailler. Brochure, posters, page Facebook et campagne de sensibilisation sont en cours de création afin de faire connaître un maximum la coopérative et son Bokashi.

Valentine Collet